Roméo et Julio

Publié par Bobby le 1 sept 2009 dans Bobby pense ... |

 

Mon Dieu ! Deux jours sans vous écrire ! Mon lectorat va me détester ! Pour me faire pardonner, j’essaierai de publier deux fois aujourd’hui. J’essaierai hein !

L’article en lui-même risque d’être un peu long, car je voudrais vous faire partager une poésie, tirée d’un fait réel, d’une personne que j’ai rencontrée au speed dating. Ce texte m’a beaucoup émue. Je vous laisse lire et je vous reprends après.

Les Amoureux du cinquième de la rue de Bresse
Une histoire de la peur et de la haine des voisins de mon immeuble.

Toute cette histoire a commencé par une très sale rumeur,
Et de suite les proches voisins du jeune couple ont eu peur.
Ils avaient pourtant l’air tous les deux gais et bien sages,
Ces deux amoureux qui chantaient l’Amour au cinquième étage.

Peu à peu on a appris qu’ils étaient devenus drôlement malades,
Malades à deux, ce n’était plus possible et ni d’ailleurs convenable !
Combien de fois chaque voisin en se passant le mot, a refusé leur table ?
Combien de fois avec leur chien ils furent du coup, seuls en balade ?

Bien sûr tout le monde s’amusait sans cesse à les épier, les surveiller,
Mais ils semblaient encore un peu trop suffisamment en bonne santé.
Qu’ils sentaient bien l’un et l’autre que leur séropositivité embêtait,
Si bien qu’ils préféraient en silence emprunter le vieil escalier.

S’ils avaient eu un rhume, une fièvre, ou une bonne et grasse toux,
Par la chance une maladie encore assez « bien de chez nous »,
Et s’ils avaient été déprimés, comme on l’est parfois dans l’année…
Même ça Seigneur ! …Les gens très gentiment leur auraient pardonné.

Et l’on aurait même été maladroitement satisfait, et si content,
Parce que les maladies « normales » en fait, ça passe le temps !
Beaucoup en cause pourtant du « truc » souvent dans l’ascenseur,
Mais c’est quoi donc cette horreur-là c’est contagieux ? Dites docteur ?

Partout on a tenté de mieux se protéger sans même rien savoir,
D’autres ont fait l’hypocrite pour pénétrer chez eux et un peu voir.
Mais personne n’a rien pu réellement comprendre ou seulement deviner,
Voilà pourquoi une nuit six hommes encagoulés leurs ont cassé le nez.

Et on leur a fendu aussi une semaine plus tard leurs jolies têtes,
D’autres les emmerdaient avec un balai… toujours lors de rares fêtes !
On a longtemps défoncé sec leurs boites aux lettres et leurs poubelles,
Et le concierge à la vue basse, lui, les nommait : « mes Demoiselles… ! »

Oui ! Tous s’y sont mis pour que finalement les piètres homos partent,
Ces deux maudits amants, « – Et vivement qu’ils se hâtent ! »
À tout l’immeuble qui les voyait pleurer, ça l’a bien rassuré !
Lorsqu’on entendait très fort dans la nuit leurs sanglots sans arrêt.

Du haut de notre tour en descendant le vieux et le sombre escalier,
Pour m’apporter leurs livres, une fleur, et de tout… me remercier,
Ils sont passés chez moi pour boire un bol de mon thé à la sauge,
M’ont embrassé si fort, tout le regard humide en tenant bien ma paume.

Puis Paul et Vincent, tous deux pleurant dans mes deux petits bras,
M’ont dit que pour nous trois, c’était fini tous ces foutus tracas !
J’avais compris à cet instant qu’une chose horrible allait venir,
Que mes malades du « Sida de la Haine » voulaient vraiment mourir !

Et saluant tous les voisins prenants à leur surprise, l’ascenseur,
Ils se sont excusés de déclencher la Guerre et tout son grand malheur.
Faisant dix bons passages ils ont souri à tous dans leurs allers-retours,
Leur décrivant mon art… mon plafond de roses, et mes poèmes d’amour.

Puis en haut de la tour, ils se sont vu l’un derrière l’autre…juste montés,
Mains dans la main, toujours fautant comme ces espiègles enfants,
Qui décident d’une jolie prière offerte soudain à leurs mamans.
Sans oublier dans leur chagrin ce premier jour où Père les eut jetés !

Ils sont sans doute morts l’âme blessée, meurtrie comme des oiseaux,
Se disant tendrement « – Regarde ! Aujourd’hui le ciel est plus beau ! »
Se rassurant même que la mort à deux est pour eux moins cruelle,
Dans un battement songé, Roméo et Julio ont secoué…leurs ailes.

La vérité veut qu’à Paul le styliste son nom vînt du poète Verlaine,
L’autre, Vincent l’artiste inconnu de son siècle écrivait pour qu’on l’aime.
Respecter les quatrains ? Et pourquoi ? Tous ces vers sont ma peine !
Impossible ! Je vous hurle, J’ai perdu la raison à l’Amour, à la Haine !

Mon texte est leur couronne mortuaire, et il n’y a pas de rythme à la mélancolie…
Il me vient par une histoire banale où deux hommes s’aiment dans un lit !
Tout me donne envie de m’abrutir la vue nez au carreau sur les gouttes de pluie.
Ca me filerait presque envie de les rejoindre tout là-haut pour décorer leur bel habit.

Le printemps fût bien arrivé là, avec toutes ses jolies fleurs en bourgeons.
Soudain un voisin chante, rue de Bresse ça sourit ! Et moi je suis bougon
Trois voisins me saluent levant par une provocation leurs mentons haut !
« Je n’ai que quatre mots pour vous, pourris ! Vous êtes des Salauds ! »

Franck T. Pinero
Poème du troisième monde, écrit suite au suicide dans la nuit du 25 juin 07
Écrit pour Paul et Vincent, qui rêvaient d’adopter un enfant.
Poésie pensée pour tous les touchés par le virus V.I.H

 

Me revoilà ! J’espère que vous avez été courageux et que vous êtes allés au bout de la lecture. Première question : qu’en avez-vous pensé ?

C’est dur, touchant, triste et révoltant. Je fais ma révoltée (du Bounty), comment est-ce encore possible à notre époque de faire des différences ? De rejeter ? De rabaisser ? De violenter ? Merde ! Est-ce qu’on agresse les personnes qui ont un cancer ? Non ! Pourtant, elles sont aussi malades. Sous prétexte que c’est deux hommes qui s’aiment (dans une société qui a du mal à l’accepter) et qu’en plus ils ont le Sida, tout est permis.

Je n’en rajouterai pas plus. L’écrit parle de lui-même. J’attends vos réactions.

Je terminerai par ceci : Franck ? Est-ce que justice a été faite ?

À toux ceux qui sont dans cette situation…À toi qui te bats, n’oublie jamais les gens qui t’aiment.

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